Verse physiologique

Fréquence

Cause importante de pertes de rendement et de qualité, la verse physiologique est très souvent imputée à des phénomènes climatiques exceptionnels (orages, pluies excessives, etc). Ces facteurs ne sont en fait que les révélateurs d’une culture fragilisée par une conduite inadaptée.
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Titre : Verse physiologique Description : * Pour apprécier la vitesse de croissance des lins, le GNIS propose le linomètre, jalon gradué tous les cm, à mettre en place dans chaque parcelle. |
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Titre : Verse physiologique Description : Les lins versés conservent une forte humidité qui favorise la sclérotiniose (Sclerotinia sclerotiorum). |

Symptômes
Parcelle
La verse s’exprime le plus souvent de manière différenciée au sein d’une parcelle, plus intensément en fond de vallée et plus faiblement dans les zones moins humides. La variation entre années pour ce paramètre est également très forte.
Plantes
Les lins se courbent, voire se couchent entièrement sur le sol dans les cas extrêmes.

Situations à risque
Le lin fibre est très sensible à la verse physiologique pour au moins trois raisons :
- il est l’espèce de grande culture semée à la plus forte densité, le peuplement visé étant de 1.500 plantes/m2.
- il se présente sous l’aspect d’une tige unique pourvue de 80 à 100 feuilles et pouvant atteindre une hauteur voisine de 1 m pour un diamètre au collet inférieur à 2 mm. Celle-ci est de fait frêle et délicate.
- les plantes peuvent gagner plus de 4 cm par jour entre le stade 10 cm et la première fleur : c’est à ce stade qu’elles sont les plus fragiles.
Les lins sont très fragiles pendant la phase de croissance rapide qui correspond à l’élongation des cellules fibreuses - entre 50 cm et le début de la floraison. A cette période, ils sont ‘mous’. La verse se produit lorsque les premiers entre-noeuds ne peuvent résister au mouvement de balancier des tiges.
A partir de la floraison, les lins font preuve de plus de ressort ; ils sont en capacité de se relever plusieurs fois s’ils versent tous dans un sens préférentiel, sans que les tiges s’entrecroisent. Dans le cas contraire, ils peuvent rester collés au sol de façon irréversible.
C'est fin mi-mai début juin que la croissance du lin est la plus forte, et que le risque de verse est maximum.
En réalité, la verse physiologique est imputable à des phénomènes climatiques exceptionnels (orages, pluies excessives et vent, etc) qui ne sont que les révélateurs d’une culture fragilisée par :
Un choix de variétés inadaptées au contexte de culture
Curieusement, ce n’est pas la hauteur des tiges d’une variété qui détermine sa sensibilité à la verse mais davantage la souplesse de celles-ci.
Une fertilisation azotée excessive
Le liniculteur maîtrise ses apports mais il ne contrôle pas la minéralisation qui peut être irrégulière et soudaine. 5 unités suffisent à faire la différence entre lins non versés et lins versés.
Une mauvaise implantation de la culture
Les plantes pourvues d’un système racinaire bien développé sont moins sensibles à la verse.
Une densité des plantes trop élevée
Plus le peuplement est élevé, plus les tiges sont fines et plus le risque de verse est important.
C'est fin mi-mai début juin que la croissance du lin est la plus forte, et que le risque de verse est maximum.
Evolution et incidence sur la production
Les fibres de lin sont constitutives des tiges et leur formation s'opère pendant toute la période de développement des plantes.
De ce fait, leur mise en place subit l'influence marquée des conditions de culture. Le moindre accident en végétation est donc susceptible d’impacter leur formation. C’est le cas de la verse dont l’expression peut être lourde de conséquence sur les rendements, la conduite des chantiers de récolte et les qualités des matières récoltées.
Les dommages sont d’autant plus grands que la verse intervient précocement.
Perte de rendement
En provoquant une courbure des tiges, la verse ralentit le métabolisme des plantes et donc leur capacité à former des fibres (élongation puis remplissage de celles-ci par accumulation journalière de cellulose) et des graines (mise en place du PMG). Ainsi, les rendements en fibres et en graines peuvent-être réduits à zéro dans le cas d’une verse totale et précoce. Le rendement en graine également.
Dans les pires cas, les lins versés conservent une forte humidité qui favorise la moisissure grise (Botrytis cinerea) et la sclérotiniose (Sclerotinia sclerotiorum). Ces deux agents pathogènes détruisent les fibres et participent grandement aux pertes de rendements.
Ralentissement des chantiers de récolte
En situation de verse, les lins peuvent être couchés dans un sens préférentiel. Il convient alors de les arracher à tours perdus, en évitant de les saisir ‘à rebrousse-poil’. Cela se traduit par un doublement du temps d’arrachage.
Si les lins sont tourbillonnés, le chantier d’arrachage est très difficile. Le temps de récolte peut être multiplié par cinq et, quel que soit le sens de travail, les tiges déposées au sol sont orientées de façon irrégulière.
Perturbation du rouissage
Après leur arrachage, les pailles de lins versés forment des andains irréguliers qui ne permettent pas un rouissage homogène des tiges par manque d’adhésion entre les tiges et la terre.
Dépréciation des qualités des fibres et des graines
En situations versées, les fibres perdent tout ou partie de leurs qualités (résistance, finesse, homogénéité) et de leurs valeurs de commercialisation. Il en est de même pour les graines destinées à la semence, qui peuvent ne plus répondre aux normes strictes concernant leur faculté germinative (> ou égal à 92 %) et leur état sanitaire.

Méthodes de lutte
La maîtrise des techniques culturales constitue la principale méthode de lutte contre la verse. Elle repose sur :
- le choix variétal : toutes les variétés sont sensibles, mais à des niveaux différents. Consulter le dépliant Variétés d’ARVALIS pour sélectionner les plus résistantes.
- la limitation du peuplement à 1.500 plantes/m² : en aggravant la concurrence pour les éléments nutritifs et la lumière, une densité plus élevée fragilise les lins.
- le raisonnement de la fertilisation azotée : un excès d’azote au-delà de 10 cm affaiblit les lins.
D’autres facteurs ne peuvent être maîtrisés (minéralisation soudaine, précipitations fortes lors de la croissance rapide des plantes, vents violents).
En cas de risque avéré, un régulateur de croissance peut être appliqué après avoir vérifié la vitesse de croissance des lins en plantant un jalon gradué* dans les parcelles. Les lins sont jugés dangereux quand ils gagnent plus de 4 cm/jour.
Les régulateurs de croissance agissent sur l’élongation des cellules de la tige, pour aboutir à des entre-noeuds plus courts ou à des parois plus épaisses et donc à des tiges plus rigides.
Dans toutes les situations, les régulateurs sont à utiliser avec beaucoup de prudence et de discernement car l’objectif est d’obtenir des lins les plus hauts possible (entre 85 et 105 cm). Il convient donc de freiner leur croissance, sans la bloquer, au risque de diminuer fortement le rendement en fibres. Les doses à appliquer sont donc faibles.
A NOTER - Un régulateur ne permet pas de valoriser des doses d'azote plus importantes que celles qui sont recommandées. |